La réparation par un tiers du vice caché affectant la chose vendue, qui n’a pas d’incidence sur les rapports contractuels entre vendeur et acquéreur, ne supprime pas l’action estimatoire de l’acquéreur.
Par acte authentique du 9 mars 2016, une société venderesse a vendu un appartement, dans un immeuble en copropriété, à un acheteur personne physique. Le 7 décembre 2017, la préfecture a engagé une procédure de péril ordinaire à l’égard de cet immeuble.
À la suite du constat de désordres affectant les planchers de l’appartement, dus à la présence d’insectes xylophages, l’acquéreur a assigné le vendeur pour obtenir la réduction du prix de vente et des dommages et intérêts, sur le fondement de la garantie des vices cachés. Le vendeur a appelé en garantie le syndicat de copropriété de l’immeuble.
Le 15 octobre 2021, la Cour d’appel de PARIS avait débouté l’acquéreur de sa demande de restitution d’une partie du prix, invoquant que le syndicat des copropriétaires ayant procédé aux travaux de remise en état, il n’était plus en mesure d’exercer l’action estimatoire, peu important qu’ils n’aient pas été effectués par le vendeur.
Il convient de rappeler qu’en matière de vices cachés, l’acquéreur dispose :
- D’une action rédhibitoire : c’est-à-dire de la possibilité de rendre le bien en obtenant la restitution du prix,
- D’une action estimatoire : c’est-à-dire de garder le bien et de se faire rendre une partie du prix.
Il s’agit donc de se demander si l’acheteur qui effectue lui-même une remise en état du bien peut toujours se prévaloir de l’action estimatoire.
La Cour de cassation a, dès lors, cassé l’arrêt de la Cour d’appel au visa des articles 1641 et 1644 du Code civil en rappelant, tout d’abord, que l’acheteur d’une chose, affectée d’un vice caché, acceptant que le vendeur procède à la remise en état du bien, est privé de l’action estimatoire.
Toutefois, elle a considéré que cette solution, qui rétablit l’équilibre contractuel voulu par les parties, ne pouvait donc pas s’appliquer lorsque la réparation, acceptée par l’acquéreur, a été effectuée par un tiers.
Pour rendre sa décision, la Cour de cassation s’est inspirée d’un arrêt de 2011 par lequel la chambre commerciale de la haute juridiction avait estimé que l’acheteur d’un bien vicié ayant consenti à ce « que le vendeur procède à la remise en état » ne pouvait « plus invoquer l’action en garantie dès lors que le vice originaire a disparu mais [seulement] solliciter l’indemnisation du préjudice éventuellement subi du fait de ce vice » (Cass, Com. 1er février 2011, n° 10-11.269).
Il convient de noter que cet arrêt avait été rendu à propos d’une action rédhibitoire menée par des acquéreurs ayant opté pour la résolution de la vente.
Il était donc intéressant d’apprendre que cette solution serait transposable au cas d’une action estimatoire, si remise en état accomplie par le vendeur.
Référence : Cass, Civ, 3ème, 8 février 2023, n°22-10.743