Même si la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid 19 ne l’aborde pas, les maires gardent leur pouvoir de police générale.
Ces derniers peuvent, en effet, sur le fondement de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, prendre toutes mesures réglementaires ou individuelles en vue d’assurer, sur le territoire de sa commune, le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques.
Toutefois, et en vertu de l’arrêt du 18 avril 1902 « Néris-les-Bains » du Conseil d’État, publié au recueil Lebon, les mesures prises par le maire, en cas de concours de police, doivent être plus contraignantes et justifiées par l’urgence ou des circonstances locales particulières.
Ainsi, lorsqu’aucun arrêté préfectoral n’a été pris afin d’interdire sur l’ensemble du département l’accès aux parcs, aux plages…, le maire peut, sous réserve que l’urgence ou les circonstances particulières le justifient, prendre des mesures en ce sens, mesures qui seront seulement applicables sur le territoire de sa commune.
Le Conseil d’État a même souhaité rappeler, sur le fondement de la jurisprudence « Doublet » du 23 octobre 1959, dans son ordonnance n° 439674 du 22 mars 2020, qu’il s’agissait d’une obligation pour les maires « d’adopter, lorsque de telles mesures seraient nécessaires des interdictions plus sévères lorsque les circonstances locales le justifient », la carence du maire pouvant conduire à engager la responsabilité pour faute de la commune.
Par conséquent, le rôle du maire, en sa qualité d’autorité de l’État, joue un rôle majeur pour lutter contre l’épidémie, ce dernier restant compétent pour prendre des mesures locales circonstanciées.
Toutefois, les mesures prises par le maire doivent, en application de l’arrêt Benjamin du 19 mai 1933, être strictement nécessaires et proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu.
C’est la raison pour laquelle, les arrêtés municipaux restent étroitement contrôlés par le représentant de l’État dans le département, ce dernier n’hésitant pas à déférer devant le juge des référés la légalité d’un arrêté lorsqu’il estime que ces mesures ne sont pas suffisamment justifiées au plan local par l’existence de risques particuliers de troubles à l’ordre public ou de circonstances particulières au regard de la menace d’épidémie.
Il sera donné pour exemple une ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal administratif de Caen, saisi par le préfet du Calvados, aux termes de laquelle a été annulé un arrêté municipal par lequel le maire de Lisieux avait provisoirement interdit la circulation des personnes sur l’ensemble du territoire de la commune, après 22 heures et avant 5 heures, à compter du 27 mars et jusqu’au 31 mars 2020.
Le juge a, effectivement, estimé que « les circonstances que les sapeurs-pompiers de Lisieux sont intervenus durant les nuits des 18 au 19 mars et 22 au 23 mars 2020 pour éteindre des feux de poubelles et qu’il a été constaté le matin du 25 mars 2020 des traces d’effraction et des dégradations au stade Bielman ne sont pas suffisantes pour justifier au plan local la nécessité des restrictions supplémentaires imposées par l’arrêté contestétant au regard du risque de propagation de l’épidémie de covid-19 que de la sécurité publique » (TA Caen, Ord., 31-03-2020 : n° 2000711).
Plus que jamais, cet exemple témoigne d’un contrôle strict des autorités publiques sur les actions du maire nonobstant la crise sanitaire sans précédent que nous traversons : le juge des référés n’hésitera donc pas à sanctionner l’action du maire si cette dernière n’est pas adaptée et proportionnée à l’objectif de sauvegarde de la santé publique, ces mesures de police restreignant, faut-il le rappeler, considérablement les libertés fondamentales si chères à notre Etat de droit.