Le Conseil d’Etat précise l’office du juge administratif dans le cadre du contentieux particulier de la levée de suspension de l’exécution d’une autorisation d’urbanisme
Référence : Conseil d’État – 10ème et 9ème chambres réunies – 16 juin 2023 – n° 470160
Par une ordonnance n° 2202638-2202754 du 25 mai 2022, le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande d’une société civile immobilière, suspendu l’exécution du permis de construire que le Maire de Courchevel a délivré à une Société immobilière le 15 juin 2021 pour la démolition et la reconstruction d’un hôtel.
Le Tribunal a, ensuite, été saisi par le bénéficiaire du permis d’une demande tendant à ce qu’il soit mis fin aux effets de l’ordonnance, sur le fondement de l’article L. 521-4 du code de justice administrative, en raison de la délivrance d’un permis de construire modificatif intervenu en vue de régulariser les vices retenus par le juge.
Ce même Tribunal a fait droit à cette demande en écartant notamment les nouveaux moyens soulevés par la requérante estimant qu’il ne lui appartenait pas de tenir compte des moyens soulevés devant lui tirés de ce que le permis de construire modificatif avait été pris par une autorité incompétente, sur la base d’un dossier incomplet et d’un avis irrégulier de l’architecte des bâtiments de France.
La requérante s’est pourvue en cassation de cette dernière ordonnance et le Conseil d’Etat a rendu, sur ce cas d’espèce, une décision remarquée, mentionnée aux Tables du Lebon, puisqu’elle apporte des précisions quant à l’office du juge saisi sur le fondement des dispositions L. 521-4 du code de justice administrative en matière d’urbanisme opérationnel.
Aussi, d’abord, il est rappelé qu’il appartient au juge des référés, s’il en est de nouveau saisi expressément par le requérant initial devenu défendeur dans le cadre de cette instance, de répondre aux moyens que ce dernier avait soulevés contre la décision dont l’exécution a été suspendue sur le fondement de l’article L. 521-1 du même code mais qui avaient été écartés comme n’étant pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire initial. A ce titre, le Conseil d’Etat précise que le Tribunal peut, le cas échéant, se prononcer sur ces moyens par référence à sa première ordonnance ainsi motivée sans entacher sa seconde décision d’insuffisance de motivation.
Ensuite, la Haute-Juridiction souligne, contrairement au raisonnement adopté par le Tribunal, que lorsque le juge des référés a ordonné la suspension de l’exécution d’un permis de construire en relevant l’existence d’un ou plusieurs vices propres à créer un doute sérieux quant à sa légalité, et qu’il est ensuite saisi d’une demande tendant à ce qu’il soit mis fin aux effets de cette suspension, il appartient à ce juge, pour apprécier s’il est possible de lever la suspension du permis ainsi modifié, de tenir compte, d’une part, de la portée du permis modificatif et, d’autre part, des vices allégués ou d’ordre public dont le permis modificatif serait entaché et qui seraient de nature à y faire obstacle.