Référence : CE, 12 juin 2023, Sté Bobigny indépendance, n° 465241
Dans un arrêté récent, mentionné aux tables du Lebon (CE, 12 juin 2023, Sté Bobigny indépendance, n° 465241), le Conseil d’Etat vient rappeler les exigences procédurales qui pèsent sur l’administration lorsqu’elle ouvre une procédure contradictoire préalable au retrait d’un permis de construire accordé.
Pour rappel, cette procédure permet au titulaire du permis de construire d’être informé de la mesure qu’il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d’un délai suffisant pour présenter ses observations.
Dans ce délai suffisant, il appartient à l’autorité administrative de faire droit, en principe, aux demandes d’audition formées par les personnes intéressées en vue de présenter des observations orales et ce alors même qu’elles auraient déjà présenté des observations écrites. Ce n’est que dans le cas où une telle demande revêtirait un caractère abusif qu’elle peut être écartée.
Il est en outre indispensable de rappeler que cette procédure contradictoire préalable constitue une garantie au sens de la jurisprudence Danthony du Conseil d’Etat pour le titulaire du permis de construire que l’administration entend rapporter (cf CE, ass., 23 déc. 2011, n° 335033).
En l’espèce, la requérante soutenait devant les juges du fond que la procédure préalable était viciée dès lors qu’elle n’avait pas pu, en sus de ses observations écrites, être entendue par l’administration. Les juges du fond ont retenu que dès lors que la pétitionnaire avait pu présenter des observations écrites, la circonstance qu’elle n’ait pas pu présenter des observations orales n’était pas susceptible de vicier la procédure contradictoire préalable.
Le Conseil d’Etat tranche que les juges du fond ne pouvaient retenir un tel motif et censure leur raisonnement :
« (…) en se fondant, pour juger que la société requérante ne pouvait soutenir avoir été privée d’aucune garantie de ce chef et écarter par suite ce moyen, sur la circonstance que cette société avait en tout état de cause pu présenter des observations écrites, le tribunal administratif a commis une erreur de droit. »
Cependant, le Conseil d’Etat vient également préciser que le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure contradictoire ne peut être retenu que dès lors qu’il est démontré, effectivement, que le rendez-vous sollicité par la bénéficiaire avait pour objet de présenter des observations orales :
« En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet d’un rendez-vous entre la société Bobigny Indépendance et le maire de la commune, évoqué lors d’échanges avec les services en août 2020, aurait correspondu à une demande de la part de cette société de pouvoir présenter des observations orales sur le retrait envisagé de l’arrêté du 11 mars 2020 par lequel le maire de Bobigny avait accordé un permis de construire à cette société. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure contradictoire préalable au retrait de ce permis de construire aurait été irrégulière faute qu’il ait été satisfait par la commune à la demande d’audition de la société Bobigny Indépendance manque en fait. »
En définitif, la procédure contradictoire préalable au retrait d’un permis de construire doit être scrupuleusement encadrée par l’administration au risque que cette dernière soit viciée.