Référence : Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 15 juin 2023, 21-22.816, Publié au bulletin
Une Commune a donné à bail emphytéotique à une société hydro-électrique une centrale hydraulique installée sur un barrage.
Dans le cadre de l’exploitation de cette centrale, la société a été mise en demeure de respecter le débit réservé, c’est-à-dire un débit minimal garantissant en permanence la vie la circulation et la reproduction des espèces vivant dans les eaux et empêchant la pénétration du poisson dans le canal d’entrée. La société exploitante s’est vu interdire l’autorisation d’exploiter la centrale hydroélectrique et a alors assigné la commune en condamnation à réaliser les travaux de mise en conformité et en indemnisation devant les juridictions de l’ordre judiciaire.
S’est alors posée la question de la nature du bail passé entre la société et la commune.
La commune soutenant le caractère administratif du bail emphytéotique.
L’article L 1311-2 du code général des collectivités territoriales dispose : « un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l’objet d’un bail emphytéotique prévu à l’article L. 451-1 du code rural et de la pêche maritime en vue de la réalisation d’une opération d’intérêt général relevant de sa compétence. »
La société indiquait que pour qu’un bail emphytéotique soit qualifié d’administratif, l’activité du bailleur ou l’opération en vue de laquelle le bail est conclu doivent se rattacher à l’intérêt général par un lien direct et principal ; que sauf dans le cas où elle est assujettie à des obligations particulières de continuité ou de volume, la production d’électricité à des fins commerciales ne constitue pas une activité d’intérêt général.
Elle indiquait également que le bail conclu avait essentiellement une finalité commerciale.
La Cour d’appel avait retenu que la production d’électricité non carbonée et la circonstance que l’exploitation du barrage devait permettre non seulement la production d’électricité non carbonée mais également la conservation d’un plan d’eau utilisé à des fins touristiques sportives et de loisirs relevaient d’une opération d’intérêt général.
Ce que confirme la Cour de cassation dans un arrêt du 15 juin 2023, relevant « la mise à disposition, par l’effet d’un bail emphytéotique, d’une centrale hydroélectrique, en vue de la production et de la vente d’électricité à un fournisseur d’énergie, en ce qu’elle favorise la diversification des sources d’énergie et participe au développement des énergies renouvelables, constitue une opération d’intérêt général relevant de la compétence de la commune. »
Pour justifier la compétence de la commune en la matière, la Cour de cassation renvoie aux articles L100-1 et L100-2 du code de l’énergie et dans leur version en vigueur à la date de la conclusion du bail (2013) et l’article L1111 – 2 du code général des collectivités territoriales qui retient que « les communes concourent avec l’Etat à la protection de l’environnement et à la lutte contre l’effet de serre par la maîtrise et l’utilisation rationnelle de l’énergie ».
Dans ces conditions, tout litige né de l’exécution de ce bail emphytéotique relève de la compétence et de l’appréciation des juridictions administratives.